La mesure des bissectrices et médianes dans un triangle

Il existe des expressions simples pour les mesures des bissectrices et des médianes dans un triangle qui ne font intervenir que les mesures des côtés.

La mesure d’une bissectrice dans un triangle

Petite référence au tout premier billet de ce blogue sur le Théorème de Stewart. C’était en novembre 2009. Ce blogue vient donc de célébrer son 13e anniversaire. Misère que le temps passe vite !

Dans un triangle \(ABC\) avec, comme d’habitude, \(m\overline{BC} = a\), \(m\overline{AC} = b\) et \(m\overline{AB} = c\), on trace une cévienne \(AD\) qui coupe \(\overline{BC}\) dans un rapport \(n:m\). En d’autres mots, \(m\overline{BD} =n\), \(m\overline{DC} = m\) et donc \(a = m + n\). Le théorème de Stewart nous dit que \[a(d^{2}+mn) = nb^{2}+mc^{2}\]

On utilisera aussi un autre théorème, cette fois-ci vu ici en 2010 : le théorème de la bissectrice dans un triangle. Si la cévienne \(AD\) est une bissectrice, alors elle partage le côté opposé proportionnellement aux côtés de l’angle, c’est-à-dire qu’on a en plus \[\frac{b}{m} = \frac{c}{n}\]On aura d’abord besoin d’exprimer ce rapport de plusieurs autres façons équivalentes. Ainsi, on a également\[\frac{b}{c} = \frac{m}{n}\]Cela nous permet d’écrire \begin{align*}\frac{b}{c}&=\frac{m}{n} \\ \\ \frac{b}{c} + 1 &= \frac{m}{n} + 1 \\ \\ \frac{b}{c} + \frac{c}{c} &= \frac{m}{n} + \frac{n}{n} \\ \\ \frac{b+c}{c} &= \frac{m+n}{n}\end{align*}De manière équivalente, on a aussi : \[\frac{c}{b+c} = \frac{n}{m+n}\]En partant plutôt du rapport inverse, \[\frac{c}{b} = \frac{n}{m}\]on obtient, avec une démarche similaire,\[\frac{b+c}{b}= \frac{m+n}{m}\]ou \[\frac{b}{b+c} = \frac{m}{m+n}\]En partant du théorème de Stewart, il sera possible de remplacer \(m\) et \(n\) par des expressions ne contenant que \(a\), \(b\) ou \(c\). On isole d’abord \(d^{2}\) dans \[a(d^{2}+mn) = nb^{2}+mc^{2}\]ce qui fait \begin{align*}d^{2}+mn &= \frac{nb^{2}+mc^{2}}{a} \\ \\ &= \frac{nb^{2}+mc^{2}}{a}-mn \\ \\ &= b^{2}\cdot \frac{n}{a} + c^{2}\cdot \frac{m}{a}-mn\end{align*}La première astuce est de remplacer \(a = m+n\) pour obtenir \begin{align*}d^{2}&=b^{2}\cdot \frac{n}{m+n} + c^{2}\cdot \frac{m}{m+n}-mn \\ \\ &=b^{2}\cdot \frac{c}{b+c} + c^{2}\cdot \frac{b}{b+c}-mn \\ \\ &= \frac{b^{2}c + c^{2}b}{b+c}-mn\\ \\ &=\frac{bc(b+c)}{b+c}-mn \\ \\ &=bc-mn\end{align*}Pas mal ! Comment se débarrasser des \(m\) et \(n\) du dernier terme ? C’est plus subtil. On multiple ce dernier terme par \(\frac{a^{2}}{a^{2}}\). \begin{align*}d^{2}&=bc-mn \\ \\ &= bc-\frac{mna^{2}}{a^{2}} \\ \\ &=bc-\frac{m}{a}\cdot\frac{n}{a}\cdot a^{2} \\ \\ &=bc-\frac{m}{m+n}\cdot \frac{n}{m+n}\cdot a^{2} \\ \\ &=bc-\frac{b}{b+c}\cdot\frac{c}{b+c}\cdot a^{2} \\ \\ &=bc-\frac{bca^{2}}{(b+c)^2} \\ \\ &=bc\left(1-\frac{a^2}{(b+c)^2}\right)\end{align*} Voilà ! On trouve \[d = \sqrt{bc\left(1-\frac{a^{2}}{(b+c)^{2}}\right)}\]ou si on préfère \[d = \sqrt{bc\left(1-\left(\frac{a}{b+c}\right)^{2}\right)}\]

La mesure d’une médiane

Le théorème de Stewart nous donne aussi une expression pour la longueur des médianes. Il y a moins de travail à faire dans ce cas-ci car si la cévienne \(AD\) est une médiane, alors \[m = n = \frac{a}{2}\]

En partant de \[d^{2}= \frac{nb^{2}+mc^{2}}{a}-mn\]on obtient \begin{align*}d^{2}&=\frac{\frac{a}{2}\cdot b^{2}+ \frac{a}{2}\cdot c^{2}}{a}-\frac{a}{2}\cdot \frac{a}{2} \\ \\ &= \frac{b^{2}+c^{2}}{2}-\frac{a^{2}}{4}\end{align*}ce qui fait \[d = \sqrt{\frac{b^{2}+c^{2}}{2}-\frac{a^{2}}{4}}\]ou, de manière équivalente, \begin{align*}d &= \sqrt{\frac{2(b^{2}+c^{2})}{4}-\frac{a^{2}}{4}} \\ \\ &= \sqrt{\frac{2(b^{2}+c^{2})-a^{2}}{4}} \\ \\ &= \frac{\sqrt{2(b^{2}+c^{2})-a^{2}}}{2}\end{align*}

Se perdre en conjectures…

Bon bon bon… peut-être que je lis un peu trop de Marty Ross ces temps-ci, mais ce dernier billet m’en inspire un autre. Un peu facile j’en conviens, mais ce qui suit provient de la chaîne Youtube du très sérieux Ministère de l’Éducation, et les commentaires sous la vidéo sont désactivés, ça devrait donc être suffisant pour me dédouaner.

On y trouve une liste de lecture dont le titre est « Mathématique ». Une occasion en or pour parfaire ma formation. Je ne sais pas si je serai en mesure de comptabiliser cela dans mes 30 heures d’« activités de formation continue » obligatoires, mais bon.

Les vidéos sur les conjectures ont retenu mon attention. En toute franchise, dans l’ensemble c’est bien.

La dernière partie de la vidéo est consacrée à la création de situations de conjectures appropriées ou la modification de situations déjà existantes.

Dans la vidéo, on explique que des enseignants ont rédigés des situations qui servent d’exemples dans une formation antérieure.

Or, \[\arctan\left(\frac{10\div 2}{8}\right) \approx 32^{\circ}\]ce qui n’est pas égal à \(36^{\circ}\) comme ça devrait l’être dans un pentagone régulier (voir ici au besoin).

Je ne crois pas non plus à une erreur due à l’arrondissement à l’entier le plus près, car dans ce cas on aurait plutôt eu respectivement 10 cm et 7 cm ou 12 cm et 8 cm. Ce pentagone régulier n’existe tout simplement pas. L’idée n’est pas mauvaise, mais au temps de Géogébra et tout le reste, je ne comprends pas que ces erreurs surviennent encore. De toute façon, c’est au deuxième point où le bât blesse.

Un heptagone régulier et un pentagone régulier dont les mesures de côtés et des apothèmes sont les mêmes ? Je ne suis pas didacticien, mais il y a certainement une dissociation dans les têtes des auteurs de ces questions entre l’expression algébrique et les variables \[A = \frac{c \cdot a \cdot n}{2}\]et les concepts géométriques et grandeurs qu’elles représentent. S’en suivent des manipulations algébriques (ou arithmétiques dans ce cas-ci) dépourvues de sens. Je suis un peu surpris et déçu que les responsables des programmes d’études en mathématique n’aient pas identifié cette erreur.

La diapositive suivante ne me rassure guère.

En supposant que le pentagone soit toujours régulier (puisqu’on parle d’apothème), on pourrait croire qu’on cherche respectivement les réponses « L’aire quadruple » et « Faux, l’aire quadruple » pour les deux premiers points. Cependant le troisième point me fait croire qu’on s’attendait plutôt à ce que l’élève réponde « L’aire double » et « Vrai » aux deux premiers points… pour ensuite répondre : « Faux, l’aire quadruple » au troisième. Mais bon, ne nous perdons pas en conjectures…

Racine carrée de 2… en base 3

Lorsqu’on écrit un nombre en base 3 et qu’on l’élève au carré, le dernier chiffre non nul du carré sera nécessairement \(1\).

Dans ce qui suit, sauf indication contraire, tous les nombres sont exprimés en base ternaire.

Dans cette base, on sait que \[1 \times 1 = 1\]et que \[2 \times 2 = 11 \]Ainsi, que le nombre se termine par \(1\) ou \(2\), son carré lui, se terminera par \(1\). Si le nombre se termine par \(0\), on a quelque chose du genre \[abc\dots z0 = abc\dots z \times 10\] où \(z \neq 0\) (en base 3, cela signifie que \(z =1\) ou \(z=2\)).

Ici on note que \(abc\) ne représente pas le produit de \(a\), \(b\) et \(c\) mais bien le nombre \(^{\prime} abc ^{\prime}\), c’est-à-dire que \(abc = 100a + 10b + c\) en base 3 ou, si on préfère, \(abc = 9a + 3b + c\) en base 10.

\begin{align*}\left(abc\dots z0 \right)^2&= \left(abc \dots z \times 10\right)^{2} \\ \\ &= \left(abc \dots z\right)^2 \times 10^{2}\end{align*}Mais puisque \(z \neq 0\), le nombre \((abc \dots z)^{2}\) se termine par \(1\). On obtient, \begin{align*}\left(abc\dots z0 \right)^2  &= \left(abc \dots z\right)^{2}\times 10^{2} \\ \\ &= def \dots 1 \times 100 \\ \\ &=def\dots 100\end{align*}Le dernier chiffre non-nul du carré est \(1\). Le fait qu’il y ait plusieurs zéros à la fin du nombre ne change rien. On a  \begin{align*}\left(abc\dots z\underset{n \text{ fois}}{\underbrace{000 \dots 000}} \right)^2 &= \left(abc \dots z \times 10^{n}\right)^2 \\ &= \left(abc \dots z\right)^{2}\times \left(10^{n}\right)^{2} \\ \\ &= def \dots 1 \times 1\underset{2n \text{ fois}}{\underbrace{000 \dots 000}} \\ &=def\dots 1\underset{2n \text{ fois}}{\underbrace{000 \dots 000}}\end{align*}

En ternaire

Supposons que \(\sqrt{2}\) soit un nombre rationnel. Si \(\sqrt{2}\in \mathbb{Q}\), on peut exprimer \(\sqrt{2}\) comme une fraction d’entiers et on peut choisir ces entiers pour qu’ils soient premiers entre eux. On obtient la fraction irréductible \[\sqrt{2} = \frac{A}{B}\]

On élève au carré et on multiplie par \(B^2\) de chaque côté \begin{align*}\sqrt{2} &= \frac{A}{B} \\ \\ 2 &= \frac{A^2}{B^2} \\ \\ 2B^{2} &= A^2\end{align*}Le dernier chiffre non nul de \(A^{2}\) est \(1\). Le dernier chiffre non-nul de \(B^2\) est aussi \(1\), ce qui implique que celui de \(2B^{2}\) est \(2\). Mais si le dernier chiffre non-nul de \(A^{2}\) est \(1\) et celui de \(2B^{2}\) est \(2\), ces nombres ne peuvent être égaux ! Contradiction!  Ainsi, \(\sqrt{2}\) n’est pas un nombre rationnel. \[\sqrt{2}\notin \mathbb{Q}\]

Référence : Polster, Burkard et Marty Ross, Putting Two and Two Together, Selections from the Mathologer Files, AMS, 2020