Une jolie image chez Futility Closet, reproduite ici – merci, Géogébra – m’inspire ce billet. C’est beau et c’est un opportun prétexte pour trouver quelques valeurs exactes supplémentaires et dépoussiérer (dans mon cas) le livre XIII des Éléments d’Euclide.

Dans trois cercles isométriques, on inscrit un pentagone régulier, un hexagone régulier et un décagone régulier. Les côtés de ces trois polygones réguliers forment un triangle rectangle. Ce triangle rectangle est la moitié d’un rectangle d’or.
On divise un -gone régulier en triangles isocèles isométriques. On considère un de ces triangles et on trace la hauteur issue de l’angle de mesure . Dans un triangle isocèle, cette hauteur est aussi médiatrice et bissectrice, si bien que l’on forme un triangle rectangle d’hypoténuse , le rayon du cercle, de cathète , la moitié de la mesure du côté du -gone. Cette cathète est opposée à l’angle de .

Le rapport sinus dans ce triangle rectangle nous donne ou de manière équivalente, Ainsi, dans le cas du pentagone régulier, et le côté mesure dans le cas de l’hexagone régulier, et le côté mesure et enfin dans le cas du décagone régulier, et le côté mesure Quelles sont les valeurs de ces sinus ? Dans le cas de l’hexagone, c’est une valeur connue, puisque la mesure du côté de l’hexagone correspond au rayon du cercle (les triangles isocèles sont en fait équilatéraux), et comme on sait que on trouve sans surprise En utilisant un autre résultat, vu ici, on sait que et en élevant au carré, En utilisant l’identité fondamentale, avec , on obtient et en remplaçant Cette dernière expression nous donne le carré du sinus, ou même le sinus, puisque , c’est la racine carrée positive de l’expression précédente On fait la même chose avec . On a sauf que là, il faut travailler un peu, ou enfin davantage… Avec l’identité on pose et après quelques étapes algébriques, on obtient la formule du cosinus de l’angle double Avec on obtient c’est-à-dire En additionnant 1 de chaque côté et en divisant par 2, on obtient la valeur du carré du cosinus. En remplaçant dans l’identité fondamentale,on a et en soustrayant, apparaît la valeur du carré du sinus Encore une fois, puisque , le sinus est positif Il reste à vérifier la relation de Pythagore : si c’est le cas, le triangle est rectangle ! En considérant le plus grand côté, celui du pentagone régulier, comme l’hypoténuse, on pose ou de manière équivalente
En divisant chaque côté par , Le membre de gauche de l’équation est connu, c’est Le triangle est bien rectangle ! Est-il une moitié de rectangle d’or ? On considère le rapport des mesures des côtés et ces quelques étapes algébriques simples (mais non moins fastidieuses) Suivent encore quelques étapes algébriques de routine, Il suffit enfin de se rendre compte que l’expression dans la grande racine carrée est un carré pour qu’apparaisse le nombre d’or !
Euclide, vieille branche !
En suivant le lien sur Futility Closet, on découvre que l’auteur de l’image de Wikimedia Commons est nul autre que David Eppstein et que l’image est intitulée : Euclid XIII.10. Diantre ! Érudits, à vos Éléments ! (Heureusement, je possède une copie peu dispendieuse, en anglais.) Comment Euclide s’y prend-t-il ? C’est sans surprise qu’il utilise son arme favorite… des triangles semblables !

Il inscrit d’abord le pentagone régulier dans un cercle de centre . Il trace un diamètre . Il trace et , perpendiculaire à , coupant en . Il trace ensuite et . Enfin, il trace la perpendiculaire à passant par , coupant en , en et le cercle en .
Il remarque d’abord que puisque est un diamètre, . Puisque la corde est le côté d’un pentagone régulier, les cordes et sont les côtés d’un décagone régulier.
Le segment étant perpendiculaire à et , on trouve (par I.26) que . Comme est le côté d’un pentagone régulier, cela implique que et sont aussi les côtés d’un décagone régulier.
De la même manière, étant perpendiculaire à , on observe que et .
Par la suite Euclide s’attarde à montrer deux choses : les triangles et sont semblables, tout comme les triangles et . On a c’est-à-dire que et En additionnant, on a ou, en considérant les angles au centre, Sauf que puisque l’angle inscrit intercepte le même arc que l’angle au centre . En substituant, on trouve Ainsi, les triangles et on un angle en commun, , et des angles isométriques ce qui fait que les triangles sont semblables ! D’autre part, puisque , et que les angles en sont des angles droits, on trouve que ainsi que, comme dans un triangle isocèle les angles opposés aux côtés isométriques sont isométriques, Ainsi, les triangles et ont un angle en commun, , et des angles isométriques Les triangles sont semblables Maintenant, puisque , on pose la proportionou, de manière équivalente,En utilisant l’autre similitude, , on trouve ou, de manière équivalente,Ainsi, en additionnant les égalités,c’est-à-dire
On vérifie la relation de Pythagore, avec le côté d’un pentagone, d’un hexagone (c’est le rayon du cercle) et d’un décagone.